Il reste à peine une heure avant d’appuyer sur la fonction «publier». J’aurais pu laisser la page blanche, tout le monde aurait compris le sujet de cet article, mais non, je barbouille des croquis d’idées qui me viennent, sans attachement, aucun, un bouddhisme littéraire, une bouderie créative. Je replie des phrases les unes sur les autres, en indiquant le mot à suivre par celui qui le précède. Un cadavre exquis. Une écriture collective composée de milles pensées, dix doigts et vingt-six lettres de l’alphabet. Là, il y a la mésange sur la branche. Une patineuse sur bottines qui danse like no one’s watching sur la patinoire du parc Molson. Un seul bouton de rose de mon rosier s’est pointé depuis le début de l’hiver. Le thé du Labrador infusé dans ma tasse vintage est froid. Un osti d’criss de drosophile sorti de la terre de mon rosier me tourne autour. Pouch. Pouch. Pouch d’huile de neem. Ça pue l’beurre de peanut. Il fait soleil. Le temps est doux. C’est d’un surréalisme économe. Le dépouillement de la méditation. Je n’ai jamais réussi à méditer. Jamais. Même que je trouve que c’est une perte de temps. J’aime b’en mieux en profiter pour penser. Le jour comme la nuit. En autant que je demeure fonctionnelle. Que serait la vie sans ma tête? Ces compositions perpétuelles m’occupent et m’amusent. Parfois, elles me «préoccucompositionnent». Hier, mon tendrépoux et moi, nous sommes installés en tête à tête à la table d’un café Van Houtte sur Sainte-Catherine, pour boire, heureux et illusoirement libres, un café Moka blanc avec full crème fouettée pour moi et un Golden chaï au pain d’épices pour lui. On reprenait fièrement nos aises dans la pratique de notre sport préféré: «le people watching» pendant que la Charlotte grimpait au mur d’escalade d’Hochelaga dans le cadre d’un programme d’aide et de développement de stratégies pour vaincre l’anxiété. Nous étions comme deux ados excités qui se cachent pour faire un mauvais coup. De fil en tricot de conversation amoureuse, je nous sentais emmitonnés d’un bonheur de se retrouver. Se reconnaître. Se voir. Se plaire. Il m’a regardée tendrement entre deux gorgées de son chaï et de la mousse de lait agrippée à la commissure de ses lèvres, il avait le sourire en armature de brassière lorsqu’il me dit: «T’sais mon amour, j’veux pas t’offenser là…, mais…. t’sais… dans tout le grand spectre de l’autisme, t’es queck’part là ‘d’dans…» Ce à quoi j’ai éclaté de rire! Je lui pardonne son manque de vocabulaire. Ou son trop plein, il ne sait plus où le mettre au bon endroit. Classer. Quantifier. Séquencer. Analyser. En fait, FJ Lapointe, c’est mon chercheur préféré. Il ne m’a pas parlé d’un trouble neurologique. Il ne m’a pas parlé d’un déficit de la communication ou d’interactions sociales. Il propose l’hypothèse que mon cerveau tient de l’ordre du mystère. Une mesure indéterminée de ce spectre. Un cerveau hétérogène. Un cerveau dynamique. Un cerveau en perpétuel continuum d’intensité évolutive. De quoi faire travailler encore longtemps la science sur l’étendue de ce fameux spectre. Une science indisciplinée. Je veux bien être le sujet d’étude de mon tendrépoux, s’il se cherche un projet de retraite, pour le reste de ma vie. Que serait mes amours sans ma tête?
Oh! Que j’aime ce qu’il y a dans ta tête ❤️
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Ahhhh et puis être assez intime pour t’appeler Mamou!!!!! Merci ma toi toute belle Adèle
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Absolument magnifique comment réussir avec des mots une si incroyable illustration amoureuse. J’en pleure de bonheur.
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Josèphe l’amoureuse, Josèphe l’entière, l’authentique, la généreuse… Merci. Tes mots, ma nécessité
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